Habitats troglodytiques : Monton__La Roche-Blanche__Corent__Enval

 

Habitat troglodytique de La Roche-Blanche

 

Le site .

La falaise à regard sud, (près de 200m de longueur) dont la hauteur varie de 15 à 20 m, domine l'Auzon, d'environ 140 m. Une vingtaine de grottes sont réparties dans la moitié inférieure avec localement trois niveaux superposés selon une même verticale. D'autres, souvent associées à des constructions, en ruine, s'observent dans le glacis (en partie recouvert de panneaux effondrés) qui relaie la falaise vers l'aval.

Le matériau .

Il s'agit de strates calcaires horizontales dont l'épaisseur dépasse rarement cinquante centimètres, plus ou moins résistantes à l'érosion éolienne, les plus dures formant des encorbellements. Les joints verticaux favorisent les effondrements de front de falaise, alors que les joints de stratification permettent le décollement de dalles au toit des grottes. Les traces des outils utilisés pour leur creusement (pointerolles et surtout ciseaux plats) sont bien visibles sur les parois verticales au tracé généralement rectiligne.

ci-contre
Facade construite après creusement de la grotte

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__________Traces d'outils

 

Un aménagement de type urbain .

Les murs en ruine (jusqu'à 8 m de hauteur) montrent que des constructions importantes (habitations) étaient adossées au pied de la falaise avec à l'arrière des annexes (caves?) creusées dans la roche.


Facade construite et enduite

Seule l'une des grottes (avec une porte et une fenêtre) présente une façade entièrement naturelle (ouvertures creusées dans la roche). D'autres montrent des façades maçonnées, souvent partiellement détruites, se prolongeant sur la falaise qu'elles chemisent. Ailleurs, des portions de murs, des éléments de piédroits ou des seuils permettent de les localiser. Les grottes, pour la plupart, se présentent comme des ouvertures béantes suite à la destruction des façades, probablement liée en partie à l'effondrement du front de la falaise (un panneau creusé de grottes, en équilibre instable a été détruit en 1830 pour des raisons de sécurité).

La topographie actuelle ne permet pas de reconstituer la desserte des différents ensembles (sentiers étroits à forte pente, escaliers, vires au pied de la falaise?). Certains niveaux de grottes sont aujourd'hui inaccessibles en l'absence d'échelle et dans deux cas l'accès au niveau supérieur s'effectue soit par une ouverture cylindrique au plafond (photo ci-contre) , soit par une "cheminée" verticale cylindrique en partie taillée (arc de cercle) dans le rocher et probablement en majeure partie construite. Elle est aménagée à l'extrémité d'un massif maçonné porteur d'un large escalier en pierre.

 

 


Piedroit et seuil de porte

 


Ouverture cylindrique pour
accéder au niveau supérieur


Les locaux .

La cellule unique de forme rectangulaire correspond au cas le plus répandu. La falaise est souvent creusée sur une profondeur de l'ordre de 6 m et localement sur une longueur qui peut atteindre 8m, sans pilier ni cloison naturelle. La différence de cote au plancher, l'amorce d'éperon rocheux en fond de cellule suggère que certaines résultent probablement de la réunion de deux cellules adjacentes. Le cloisonnement de tels espaces par des murs maçonnés orientés perpendiculairement à la façade s'observe localement. La hauteur de plafond généralement comprise entre 1,90 m et 2,50 m, atteint exceptionnellement 3,50 m. La communication entre les cellules voisines, par une porte creusée dans la roche, est exceptionnelle. La présence d'annexe latérale à plafond voûté et à cote inférieure est elle-même très rare. Vers l'est de la falaise, cinq grottes voisines sont constituées de deux cellules disposées en enfilade. L'accès à la cellule du fond, de forme rectangulaire ou trapézoïdale, au plancher nettement plus bas, se fait par l'intermédiaire de deux ou trois marches. Leur superficie varie de 7 à 25 m2 alors que la hauteur de plafond (localement plus basse en fond de cellule), toujours plus faible que celle de la cellule antérieure, est comprise entre 1,45 m et 1,90 m. La communication entre les deux se fait par l'intermédiaire d'une large baie voûtée rappelant une entrée de cuvage, ouverte dans une cloison naturelle.

A l'est, à hauteur de la tour, deux grottes voisines entaillent profondément la falaise (jusqu'à 12 et 15 m). La cellule arrière de l'une d'entre elles, très longue (près de 8 m) et relativement étroite (2,20 m), à plafond décroissant (2,20 m à 1,70 m) prolonge dans son axe la cellule antérieure. Dans l'autre, elle est remplacée par une longue galerie (9 m de longueur) dont la largeur diminue progressivement (1,90 m à 1,40 m) de même que la hauteur du plafond (1,70 m à 1,50 m). Au fond elle se prolonge par une structure équivalente, de dimensions encore plus réduites, orientée à 90° de la précédente (longueur de 3,50 m). Celle-ci donne accès à une cheminée verticale. D'une hauteur de l'ordre de 6 m, son diamètre varie considérablement (0,80 à près de 2,50 m) en fonction semble-t-il de la dureté des strates calcaires.

 

 


Cloison construite

Cheminée sous la tour et sa galerie d'accès

Les aménagements intérieurs .

Les "niches" .Il s'agit d'alvéoles (niches) creusées dans la roche. Elles différent par leur dimensions, leur forme et leur répartition (localisation et nombre) sur les parois des cellules. Les plus grandes (volumes compris entre 0;2 et O,5 m3) sont à ouverture rectangulaire (quelques-unes en forme de trapèze) à plancher plat et fond sensiblement vertical. Certaines montrent en façade de larges feuillures taillées pour recevoir une porte, avec parfois, à proximité, des orifices de fixation de gonds ou des rangées de pointes (fixation d'une charnière ?). D'autres présentent en partie haute un couple de rainures permettant l'intégration d'une étagère ou une série de trous de fixation d'un support pour un tel élément.

Les alvéoles à fond arcé, ou à ouverture avec un arc en partie haute sont assez rares et en général de taille réduite. Dans plusieurs grottes, on note la présence de niches à plancher en cuvette(trois dans la même cellule). Rares sont les cellules dépourvues de niche. Présentes sur les différentes parois, elles montrent parfois une certaine diversité. Tel est le cas dans la plupart des cellules antérieures dont le plafond est souvent noirci par la suie, dépôt lié au type d'éclairage. Cette densité de niches semble traduire une affectation en local d'habitation. L'une des cellules montre des aménagements remarquables: une étagère d'angle (strate laissée en relief), un couple de corbeaux conservés en relief au dessus d'une niche profonde à ouverture rectangulaire, une autre niche prismatique à ouverture rectangulaire avec des feuillures en façade et des rainures horizontales, pour recevoir un tiroir.

Feuillures et rainures pour tiroir

 

Niche à fond en cuvette

Niches avec des feuillures

Autres aménagements .  

 

•  Une citerne ? Un cadre bétonné de section carrée et un tuyau en terre cuite traversant la dalle qui la recouvre permettent de la repérer. De 6 m de profondeur et 1,20 m de diamètre elle a été creusée à l'entrée d'une grotte ouverte à l'arrière d'une ancienne construction. Elle était peut être alimentée par les eaux du toit.

Citerne
•  La présence de boulins (48 dans une même cellule) dans une demi-douzaine de grottes situées en hauteur mais aussi en partie haute de cellules de niveaux intermédiaires et dans le conduit cylindrique entre deux grottes. Une telle affectation en pigeonnier pourrait être tardive.

Boulins

•  Une cheminée d'accès au plateau ? . Creusée semble-t-il sensiblement à l'aplomb de la tour érigée sur la colline, son plafond parvient seulement à 5 ou 6 m du sol. Les replats dégagés au dessus des strates résistantes sont susceptibles de permettre la pose d'un plancher ou d'une échelle. Cette cheminée est elle occultée en partie haute ou son creusement a-t-il été interrompu ?

•  Un anneau creusé au pic est visible au fond d'une grotte, en pied de falaise.

•  Des caves L'humidité décelée au fond des cellules arrière (développement d'algues au pied des parois ou présence de salpêtre) rend probable leur utilisation en tant que cave malgré l'absence de chantiers.

•  Une cheminée ? Seule l'une des grottes présente à l'intérieur de sa façade naturelle, percée d'une ouverture, un sur-creusement à forte pente interne.

•  Des enduits . Seule la grotte la plus occidentale est en partie enduite, caractère que l'on retrouve à l'intérieur des constructions édifiées au pied de la falaise.


Voie d'accès entre 2 cellules superposées

 

Un habitat ancien, progressivement abandonné

L'armorial de Revel (milieu du XV° siècle) laisse entendre qu'à cette époque les constructions recouvraient le glacis jusqu'à la falaise. La présence d'ouvertures en l'absence de toit traduit l'existence de grottes. Cette continuité n'apparaît que dans le secteur oriental, à l'intérieur des fortifications qui viennent buter sur elle (elle n'apparaît plus actuellement du fait de la destruction, par éboulement ou chute de rochers, des immeubles édifiés sur le glacis et abandonnés depuis longtemps). A l'ouest, il semble que seul le pied de la falaise soit occupé par quelques constructions importantes (toitures, portes et fenêtres) relayées vers l'ouest par une grotte (deux ouvertures, pas de toit). La densité de l'habitat à l'intérieur du rempart traduit une exploitation maximale des espaces disponibles. L'aménagement de la falaise augmente le potentiel du secteur. Sur une carte postale ancienne, ainsi que sur un croquis datant de 1886, on voit qu'une bretèche (élément de construction défensif, présent également au dessus de l'entrée de l'église de Gergovie) garde l'entrée d'un immeuble à trois niveaux adossé à la falaise. Le creusement des grottes et leur aménagement pourraient être en relation avec les troubles liés à la guerre de Cent Ans. L'un des piédroits de porte présente une moulure en creux, décor classique dans les encadrements de baies des XIV° et XV° siècles.

Plusieurs textes indiquent qu'à la fin du XVIII° siècle, des grottes sont encore habitées par des pauvres qui s'entassent dans des "tanières" sans fenêtre ni cheminée. L'occultation des ouvertures aménagées dans une façade maçonnée d'un niveau supérieur témoigne d'aménagements successifs. Un rapport des Ponts et Chaussées daté de 1827 signale que quelques grottes accessibles par des sentiers extrêmement raides, et même par des échelles, sont encore habitées tandis que d'autres servent de colombiers.

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